Le 31 août 2009, l’Online News Association américaine (ONA) a publié la liste des finalistes pour le titre de meilleurs sites de journalisme en ligne en 2009. Rue89 est le seul site français retenu, toutes catégories confondues. Il a pour concurrents dans la catégorie Site généraliste hors langue anglaise, lanacion (Argentine) et soitu (Espagne).
Du 1er au 3 octobre 2009, lors de sa convention annuelle qui se tiendra à San Francisco, l'ONA (principale organisation de journalistes en ligne aux Etats-Unis) fêtera ses dix ans d’existence et attribuera ses Awards le jour de la clôture, le 3 octobre.
L'impétrant de la catégorie dans laquelle concoure Rue89 recevra un prix de 3 000 US$ (environ 2 000 €).
Enfin, on peut déjà avancé un pronostic : une catégorie n'aura ni gagnant ni perdant, celle de Blogueur (catégorie small site) puisqu'elle figure dans la liste des prix mais sans nommés. Ce qui est très surprenant et nécessiterait d'être expliquer par les organisateurs.
Un problème de moins pour les jurés parmi lesquels siègera le Français Eric Scherer de l’AFP, membre du Awards Committee.
Les critères de sélection transparents de l’ONA
L’ONA organise l'attribution de ses Awards sur des critères quantifiables et sur la base d'usages professionnels précis qui renvoient à « la bonne pratique » du journalisme sur le web.
L'entreprise, louable de par sa transparence, mériteraient de faire un peu plus école, ne serait-ce que dans ce cher hexagone :
- Plus d’un million de visiteurs uniques par mois
- Respecter les standards de la profession de journaliste
- Remplir une mission éditoriale avec un contenu de qualité
- Servir avec efficacité son public
- Optimiser l’utilisation des outils spécifiques au Web
- User avec excellence :
de l’ergonomie des outils communautaires (web.2).
Des critères qui ont l’avantage d’exclure une pseudo subjectivité à la française (le côté « artiste », si prisé par ici), qui recouvre d’un voile (pas pudique du tout) les petits arrangements entre amis lors des différents raouts « familiaux » que sont les remises de prix (César, Molière, Victoires de la Musique…).
Peu ou pas de sites français nommés par l'ONA
Si Rue89 figure dans le trio de finaliste dans sa catégorie, a contrario, on remarque l’absence des médias en ligne français, pure players ou bimédias.
En 2008, seul un site français avait été nommé par l’ONA : Blogtrotters, le pure player de Tristan Mendès-France et Alban Fischer.
A regarder de près la liste des sites retenus, les États-Uniens demeurent fidèles à eux-mêmes et à leur tropisme américano-américain, ou du moins anglo-saxon. Ils privilégient les sites de langue anglaise (même phénomène que dans le cinéma ou la musique) et laisse la portion congrue aux médias s’exprimant dans une autre langue, exceptée l’Espagnol, deuxième langue la plus pratiquée aux États-Unis, voire la première désormais dans certaines régions.
Est-ce un hasard si El Pais et le pure player soitu.es, créé par des dissidents du bimédia El Mundo, furent couronnés en 2008. Ce qui ne retire rien à leur qualité et leur créativité de journaux en ligne.
Des médias français online frileux
Or, ce tropisme Etats-Uniens – cette vision américano-centrée – n'explique pas tout, même s'il est déterminant. Pas plus de médias allemands, italiens... ne sont à l'honneur.
En observant le paysages de la presse en ligne française, on peut avancer quelques explications sur l’absence de représentants français dans la liste finale des Awards de l'ONA.
Explication qui sont à chercher du côté de l'économique, bien sûr, mais aussi du côté du manque criant d'innovation, d'imagination et de freins culturels empêchant d'envisager tout le partie à tirer du foisonnement créatif du Web, et pas seulement sur le plan de la technophilie.
Sauf à reprendre, tel quel, ce qui a fait ses preuves ailleurs, à la manière des programmes TV français toujours à la traine de plusieurs saisons sur ce qui se fait outre-Atlantique.
Surtout absents de la liste de l’ONA, les médias traditionnels français (hebdos et quotidiens) qui diffusent sur la toile. Il faut croire qu’ils se révèlent peu inventifs, ou frileux, quant à l’usage par exemple des outils spécifiques du Web et du rich média en particulier.
Souvent ils continuent de penser print quant il faudrait penser Web.
Hors pure players, et encore, quel site d’information en France expérimente les nouveaux outils ou invente de nouveaux formats à la manière du New York Times ? ou dans le domaine du photojournalisme à celle de MediaStorm ?
Les pure players français à la peine
Après l’émergence de pure players se voulant vraiment en phase avec le journalisme digital et ses outils et format en devenir permanent, créés pour la plupart par des journalistes venues de la presse écrite (Rue89, Mediapart, Bakchich, Arrêt sur image et dernièrement Slate), le collapsus boursier de septembre 2008, la baisse des investissements publicitaires (et parfois leur retrait pur et simple) et les difficultés récurrentes que rencontrent les pure players à exister et à durer en inventant un modèle économique viable – et surtout une autre façon de faire du journalisme et d'informer – n’incitent guère à l’optimisme et au lancement de nouveaux projets d’envergure.
Alors, d'aucuns, pour sortir de la crise ou en "adoucir" les effets, proposent de revenir aux vieilles solutions, celles qui marchaient avant... avant le Web, bien entendu. Ceux-là prônent le retour ou l’élargissement de l’accès payant à l’information. Le journal Libération annonçait en septembre 2009 qu'il passerait partiellement au payant.
La contre-offensive du payant (la loi Hadopi est un des éléments de cette manoeuvre) est lancée et pas seulement pour l'info : musique, cinéma…
Gratuit ou payant ?
Ce débat omniprésent gratuit-payant, jusque-là plutôt de basse intensité, a été relancé par Rupert Murdoch qui annonçait en août 2009 une perte 3,4 milliards de dollars pour son groupe News Corporation (Wall Street Journal, The Times, New York Post…) et revenir au payant pour les sites de ses journaux. Inquiétant. Du côté de Prisma Presse (groupe allemand Gruner & Jahr - Bertelsman qui publie Capital, Géo, Femme actuelle, Gala…), la direction annonçait début septembre 2009 un plan de quarante-cinq départs volontaires sur quelque mille salariés.
Outre le secteur marketing, la rumeur veut que les principales victimes seraient celles travaillant pour le Web, auxquelles il serait proposé environ un an de salaire pour leur départ.
Que deviendront les sites ?
Certains patrons de presse et de rédaction rêvent peut-être, encore en sourdine, que des automates gèrent la maintenance de sites Web alimentés par des dépêches.
Messieurs, autrefois cela s'appelait des téléscripteurs.
Pour ceux qui voudraient prendre connaissance des sites online en compétition (et se constituer un répertoire fort utile de sites) voir ci-dessous:
La liste des finalistes pour les 2009 Online Journalism Awards
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